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servi jusqu'à présent que de prétexte pour faire valoir l'attachement sans bornes du Roi pour tous les gouvernemens françois que la révolution a enfantés, quoique diametralement opposés aux sentimens personnels de ce Souverain. Le Cabinet prussien n'abusera pas des ouvertures qui lui seront faites par la Russie, parce qu'il craindra de se compromettre vis-à-vis de cette Puissance; il y entrera volontairement, s'il croit ne devoir se mettre en avant que pour aider à empêcher l'Europe d'offrir de nouveau des moyens d'agrandissement à la France, et ce n'est encore que la Cour de Russie qui jamais puisse le déterminer à un concert qui entraîneroit quelque chance de guerre.

Le service le plus essentiel que la Cour de St. Pétersbourg pourroit nous rendre, et en même temps à l'Europe entiere, seroit de s'employer à l'éloignement de Lombard de son poste actuel, où il se trouve placé comme une vedette de Bonaparte pour entraver ou, ce qui équivaut, pour le mettre au fait de toute mesure qui ne seroit pas la sienne. Le moment actuel sembleroit devoir faciliter à la Russie la réussite d'une négociation délicate, mais qui détruiroit un des plus puissans obstacles à un concert entre les trois Puissances: sa brouillerie avec la France, le changement du Ministere Prussien, dont probablement l'intérêt personnel séconderoit ces vues et surtout l'embarras momentané dans lequel se trouve le Roi par les mesures que les chances de guerre avec la Suede pourroient entrainer de la part des François dans le nord de l'Allemagne. La conduite non interrompue de Lombard, ses principes connus, sa liaison avec la France, l'impossibilité dans laquelle nous sommes de nous confier à cet homme, tout serviroit de pretexte, si l'on pouvoit être embarassé d'en trouver pour l'éloigner d'une place où il doit nécessairement porter ombrage à toute Puissance qui n'est pas exclusivement dévouée à la France. La difficulté de remplacer Lombard par un sujet plus digne de servir son Maître, est grande: jamais peut être la pénurie d'hommes propres à être employés dans la carriere diplomatique ne s'est fait sentir plus fortement qu'ici; mais certainement on ne pourroit supposer la possibilité d'en trouver un qui fût plus dangereux que Lombard. Il seroit infiniment heureux, si ce concert, appuyé par le poids de la Russie et cimenté par notre desir sincere de réunir nos intérêts les plus chers à ceux d'un État qui depuis long-temps ne devoit plus nous traiter en rival, devoit s'établir, que les deux Ministres d'Autriche et de Russie près la Cour de Berlin reçussent les ordres de s'entendre sur toutes les ouvertures, et que leur langage fût parfaitement conforme sur tous les objects d'un intérêt commun. Cette unité de volonté et d'expression prouveroit au Cabinet d'ici qu'il existe entre nous et la Russie un Concert fait pour lui imposer, en même temps qu'il lui ouvriroit des moyens assurés de se tirer de l'embarras dans lequel il ne cesse de se trouver depuis plus d'une année, en réunissant ses vues à celles des deux Puissances.

Je suis avec etc.

2.

Comte Metternich au Comte Colloredo.

Berlin ce 29. Octobre 1804.

En conformité des ordres transmis par Votre Excellence dans Sa dépêche du 26. Septembre, je me suis empressé de tenir à Mr. d'Alopeus un langage analogue aux vues de rapprochement entre les trois Cours, et au desir bien prononcé de Sa Majesté Impériale de convaincre le Cabinet de Berlin, que ce n'est pas de notre côté qu'existent les difficultés qui jusqu'à présent se sont offertes dans toutes les occasions où nous avons voulu concerter des mesures avec cette Cour. J'ai trouvé que jusqu' ici Mr. d'Alopeus ne me répondoit jamais que par des phrases assez vagues, et je me suis toujours borné à lui parler dans le même sens, convaincu que ce n'est qu'à St. Pétersbourg même que peuvent se jeter les bases d'un rapprochement sincere et solide entre les trois Puissances et surtout entre les Cabinets de Vienne et de Berlin. Mr. d'Alopeus est venu ce matin chez-moi, après m'avoir cherché hier sans me trouver, pour me dire, qu'ayant fait usage près de sa Cour des dispositions que je lui avois laissé entrevoir, il venoit d'être chargé de se prononcer dans le même sens, et de m'en prévenir. Il ajouta avoir été hier chez Mr. de Hardenberg, pour sonder ses dispositions, et que ce Ministre lui avoit dit avoir remarqué dans tous les entretiens avec moi les vues les plus favorables à un rapprochement et à un concert entre nos deux Cours et que ma conduite répondoit parfaitement aux dispositions que l'on avoit montrées à la mission de Prusse à Vienne, mais que nulle ouverture officielle ne lui étoit encore parvenue. Il a assuré en même temps, qu'il s'empresseroit de soumettre au Roi la première démarche de ce genre que je serois chargé de lui faire.

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Je remerciai Mr. d'Alopeus de la communication qu'il vouloit bien me faire, et lui réitérai les dispositions favorables de ma Cour envers celle de Prusse, si toutefois des mesures tendantes à la sûreté et au repos de l'Europe pouvoient s'établir de concert avec la Russie, et sans nous exposer à nous voir de nouveau compromis vis-à-vis de la France, ce qui nous étoit arrivée à peu-près dans toutes les occasions précédentes. J'ajoutai les assurances du plaisir que feroit à Vienne le contenu d'une dépêche qui de nouveau prouveroit l'intimité si heureusement subsistante entre nos deux Cours. Mr. d'Alopeus crut devoir attribuer à Mr. de Lucchesini la plus grande partie du mal que la Prusse avoit tenté de nous faire, et tout en m'assurant des principes bien différens de Mr. de Hardenberg, il me dit que l'oubli du passé lui paroissoit devoir précéder tout rapprochement futur. Je lui certifiai que l'intérêt de l'Europe et celui que la Russie sembloit prendre à ce rapprochement, qui rempliroit tous mes voeux personnels ne pouvoient qu'ajouter au desir de mon Auguste Maître que cet oubli soit aussi sincere de la part de la Prusse qu'il l'est de la nôtre. conduite que Sa Majesté Impériale a cru devoir suivre dans toutes les occasions, ajoutai-je, la réception distinguée qu'on a faite au Prince de Prusse, les bontés qu'on a eues pour tous les individus de ce pays qui se sont présentés cheznous, la ligne sur laquelle j'ai marché depuis que je suis à Berlin, tout doit avoir convaincu le Roi et Son Ministere de la vérité de cette these. Mr. d'Alopeus me dit que le Baron de Hardenberg lui avoit assuré avoir transmis à

La

Mr. de Finkenstein l'ordre de montrer à Vienne des dispositions pareilles à celles qu'il venoit de lui énoncer.

La conversation que je viens de tracer à Votre Excellence, m'a paru offrir assez d'intérêt pour la faire partir d'ici pour la frontière par le Courrier de la mission. La connoissance parfaite que j'ai du caractère et de la manière de traiter d'affaires de Mr. d'Alopeus, contribue à en augmenter la valeur à mes yeux. Nullement informé de la marche de nos négociations à St.-Pétersbourg, je ne sais si les ordres exprès que ce Ministre doit avoir eus de se prononcer vis-à-vis de moi comme il l'a fait, et que le courrier arrivé hier lui a sans doute transmis, sont la suite d'ouvertures nouvelles faites par notre Ambassadeur, ou si elles émanent directement du Cabinet de St.-Pétersbourg. Appuyées par la Russie, des propositions tendantes à un rapprochement sincere, revêtues d'un caractere officiel, et basées sur la prudence la plus étendue, seroient assurément reçues et bien vues par le Ministere d'ici. Le moment actuel semble plus propice que nul autre: toute confiance dans les promesses du gouvernement françois paroît détruite ici, et je ne saurois rendre dans toute son étendue l'effet que vient de produire l'horrible événement de Hambourg. J'ai trouvé hier Mr. de Hardenberg pétrifié et dans l'attitude d'un homme qui calcule la profondeur du piege qu'on a tendu à sa bonne-foi. Il n'a cessé de me parler de la contradiction inconvenable entre les dépêches que venoit de lui porter un Courrier de Mr. de Lucchesini, et les faits dont nous venons d'être témoins. Rie assurément ne pouvoit toucher plus directement le roi et le Ministere que cet événement. Ils ne peuvent empêcher de calculer le ridicule dont un moment de fougue de Bonaparte vient de couvrir tous les engagemens, que le Roi a contractés vis-à-vis de la Suede et de la Russie. L'arrivée du Courrier de Mr. d'Alopeus, dont les dépêches blâment les entraves qu'on a mises aux moyens de défense de la Poméranie, la confiance sans bornes que Mr. de Hardenberg m'a dit avoir eues lui-même, encore avant-hier matin, dans les promesses réitérées du Gouvernement françois, de respecter dans toute leur étendue les soins du Roi pour la tranquillité du Nord de l'Allemagne, et qui se trouvent maintenant réduites à leur juste valeur, tout concourt à prouver à cette Cour qu'elle a beaucoup risqué en confiant sa considération publique et ses intérêts les plus chers au Gouvernement. Cette Puissance a, par ce seul fait, sappé dans ses fondemens un édifice qui jusqu'à présent paroissoit inébranlable, et nous tirerions sans doute grand parti de ce moment de crise, si nous agissions vis-à-vis de la Cour d'ici dans le concert le plus intime avec la Russie. Je suis avec respect etc.

3.

Comte Metternich au Comte Colloredo.

Berlin ce 17. Novembre 1801.

Il seroit difficile de dépeindre l'État de stupeur et de Consternation causé ici par les attentats qui se suivent depuis peu dans nos Environs. Le Baron Hardenberg s'est prononcé avec tant de force, que son Existence future et surtout sa Réputation diplomatique dépendent de la Marche qu'il suivra dans le cas, que la Réponse du Gouvernement françois à la Demande de la Remise

de Rumbold soit negative. Il est determiné à soutenir la Thèse que le Roi doit faire la Guerre plutôt, que de souffrir l'État actuel des choses, et s'est expliqué dans ce Sens vis-à-vis d'un de mes Collegues, il y a peu de jours. Il m'a demandé hier, si je n'étois pas encore instruit de quelle manière l'Evénement de Hambourg avoit été envisagé à Vienne. Je lui répondis, que je ne pouvois douter qu'il n'y eut produit, quant à son Illegalité, le même Effet qu'ici. Il m'a dit en même tems, que Mr. la Forêt lui avoit demandé une Conférence dans la Soirée, mais il ignoroit ce qu'il pouvoit avoir à lui dire, si ce n'étoient des Lamentations personelles. Mr. Hardenberg a assuré qu'il n'avoit jamais eû la moindre Connoissance de la soitdisante Circulaire du 18. Fructidor, ouvertement fabriquée après.

Mr. Jackson a prévenû ce Ministre des Mesures de Sûreté, qu'il prendroit chez lui. Il déclare qu'il ne pouvoit les blâmer. Le Tableau de l'état des armées françoises dans le Pais d'Hannovre joint à la dépêche C. a été apporté ici par le Duc de Brunswic.

Je suis avec etc. etc.

4.

Comte Metternich au Comte Colloredo.

Berlin ce 20. Novembre 1801.

La condescendance que le Gouvernement François vient d'avoir pour le Roi, peut être considerée comme un triomphe remporté par Mr. de Hardenberg sur un parti qui préparoit la rentrée de Mr. de Haugwitz dans le Ministère. Le bruit de son prochain retour avoit été répandu avec soin depuis plusieurs jours. On parle de la legéreté avec laquelle Mr. de Hardenberg avoit exposé la tranquillité de ce Pays; et sa qualité d'étranger fut surtout un des motifs d'opposition le plus expressement mis en avant; le succès de cette première demarche energique du Ministre qui vient d'être couronné doit nécessairement lui assurer une influence étendue et stable, et le mettre à même de déployer par la suite des principes plus dignes d'une grande puissance que ne le furent ceux de son prédecesseur. Le parti anti-françois qui esperoit que les représentations du Roi n'auroient point d'effet, se consolent maintenant par l'idée d'une première défaite de l'Empereur Napoleon.

Je suis etc. etc.

5.

Comte Colloredo au Comte Metternich.

Vienne, le 15. Novembre 1804.

L'arrestation et l'enlèvement du Chargé d'Affaires Anglois le Sr. Rumbold, exécutés sur un ordre du ministre de la police Fouché par un détachement de soldats françois, est le second tome de l'attentat commis envers l'infortuné Duc d'Enghien.

Si celui-ci l'emporte par la qualité de l'illustre victime, et l'atrocité de la

En chiffre.

En chiffre.

Catastrophe, en revanche l'événement qui vient de se passer près de Hambourg lèse les droits les plus sacrés parmi les nations policées par le Caractère diplomatique qui n'a pas été respecté même dans le Cercle de l'Empire auquel est accredité le Chargé d'Affaires Britannique sur le territoire d'une Ville libre Imperiale dont la neutralité a été expressement stipulée par le Gouvernement françois et précisement à la même époque, où Napoléon réiteroit à Sa Majesté Prussienne les assurances les plus positives de sa détermination à respecter la tranquillité et la neutralité du Nord de l'Allemagne au delà de la ligne de ses occupations actuelles.

Cette dernière circonstance et celle que le Roi dans sa qualité de Due de Magdebourg et de Directeur du Cercle de la Basse-Saxe, est lui même un des Princes aux quels le Sr. Rumbold est accredité, rendent la violence exercée sur sa personne, doublement offensante pour Sa Majesté Prussienne qui doit en être d'autant plus vivement affectée, qu'Elle étoit devenue en quelque sorte le garant des dispositions du Gouvernement françois pour la neutralité du Nord vis-à-vis de Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies.

Rien n'est donc plus juste et plus naturel que la sensibilité que la Cour de Berlin témoigne sur le fait dont il s'agit et la reclamation adressée de sa part a Gouvernement françois pour la mise en liberté du Sr. Rumbold.

Il ne seroit pas moins naturel qu'une preuve aussi frappante que le Souverain actuel de la France ne respecte pas plus les liens de l'Amitié et la foi des promesses que le principe du droit des gens ait enfin achevé d'ouvrir les yeux de la dite Cour sur les dangers communs de l'Europe sur la nécessité qu'elle se joigne avec les deux Cours Impériales pour concerter avec elles les mesures les plus propres à préserver la sûreté et l'equilibre général d'atteintes ultérieures, objet qu'une réunion aussi imposante pourroit même remplir par son seul poids et sans que la paix du Continent en soit troublée en même tems que dans le cas d'une Guerre inévitable, on opposeroit au moins à Napoléon une réunion de forces capables de lui tenir tête.

Rien ne seroit plus agréable à notre Cour et ne viendroit plus à propos dans le moment actuel qu'un tel Changement dans les dispositions de la Cour de Berlin.

Vous avez eu connoissance Mr. le Comte, avant votre départ de Vienne, de l'invitation qui nous a été faite en secrêt de la part de la Cour Impériale de Russie, d'entrer avec elle dans un Concert de mesures actives éventuelles pour le cas où des entreprises d'envahissemens ulterieurs compromettraient la sûreté générale. Les armemens et rassemblemens de troupes considérables qu'Alexandre I. a faits en même temps sur sa frontière et le langage énergique par lequel il a reclamé contre la non-exécution des engagemens de Bonaparte en Italie, contre l'occupation du Hanovre, contre sa violation du territoire Germanique par l'enlèvement inoui du Duc d'Enghien, ont bien prouvé combien le zéle pour la bonne Cause commune de cet Auguste et magnanime Souverain est sincère et généreux.

Aussi ces ouvertures du Cabinet de Petersbourg ont elles donné lieu aux explications les plus intimes et les plus suivies entre les deux Cours Impériales et si la délicatesse de notre position, les dangers auxquelles nous serions exposés par une attaque françoise avant d'y être préparés, et que les secours de la Russie ne soyent à portée, n'ont pu permettre à François II de manifester

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