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P. S. Vous recevez ci-joint une lettre autographe de l'Empereur à Sa Majesté Impériale de France, et sa copie.

Vous ne trouverez qu'une seule minute de Note au Duc de Bassano. Elle est applicable aux trois chances admises dans la présente dépêche, et nous nous reservons de porter dans la suppositions de la 3. chance, les conditions énoncées par les Alliés à Votre connoissance avec un projet de Note

nouveau

55.

Précis sommaire d'une conversation avec l'Empereur Napoléon le 26. Juin 1813.

Le Duc de Bassano m'ayant adressé le 26. Juin au matin le billet cijoint, j'avais lieu de m'attendre que l'Empereur me recevrait en sa présence. Arrivé au Jardin de Marcolini je fus annoncé sur le champ et S. M. me reçut seule dans son cabinet.

Elle vint au devant de moi et me demanda avec un air très serein des nouvelles de l'Empereur. J'entamai au bout de quelque tems la conversation en Lui disant que je me présentai devant Lui en suite de son invitation et d'après ma conviction dans le moment le plus important pour les relations futures entre les deux Empires et pour l'Europe entière.

Il dépend de V. M., Lui dis-je, de donner la paix au monde, de fonder son gouvernement sur la plus forte des bases, la reconnaissance générale; si V. M. laisse échapper ce moment, quels peuvent être les bornes et le terme des bouleversemens?

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L'Empereur me répondit qu'il étoit prêt à faire la paix; mais que plutôt que d'en faire une déshonorante, il périrait; „je l'ai écrit à l'Empereur tinua-t-il mon honneur par-dessus tout et puis la paix!“

Je lui répondis que des propositions déshonorantes n'entreraient jamais dans les calculs de l'Empereur François.

„Eh bien qu'entendez-vous par paix? m'interrompit l'Empereur, quelles sont vos conditions? Voulez-vous me dépouiller, voulez-vous l'Italie, le Brabant, la Lorraine? Je ne céderai pas un pouce de terrain: je fais la paix au status quo ante bellum.

Je donnerai même une partie du Duché de Varsovie à la Russie; je ne vous donnerai rien, parceque vous ne m'avez pas battu; je ne donnerai rien à la Prusse, parcequ'elle m'a trahi; si vous voulez la Gallicie occidentale, si la Prusse veut une partie de ses anciennes possessions, cela peut se faire, mais contre compensations. Il faudra alors que Vous indemnisiez mes alliés. L'Illyrie m'a couté 300 m. hommes à conquérir; si vous voulez l'avoir, il faut dépenser un nombre égal d'hommes."

Je répliquai après cette première sortie que je n'étais nullement appellé à discuter ici les conditions de la paix future mais simplement d'insister sur la réunion la plus prompte des négociateurs sous la médiation de l'Autriche ou bien sur le refus de l'Empereur de négocier sous cette médiation. Que les négociateurs réunis, rien ne s'opposerait à la discussion sur les bases d'une pacification: que l'Autriche remplirait dans cette importante conjoncture le rôle de la médiation avec la plus entière impartialité.

56.

Rapport du Comte Metternich sur la marche de la négociation à Prague.

Prague ce 28. Juillet 1813.

Le Duc de Vicence étant arrivé ici aujourd'hui à Midi, le Comte de Narbonne vint me trouver et me prévint que le 1. Plénipotentiaire désirait se rendre chez moi dès qu'il auroit pris quelque repos.

Mrs. de Vicence, de Narbonne et leurs sécrétaires, de Rayneval, de Cabre et de Lajard vinrent me trouver effectivement à 3 h. Cette première entrevue se passa dans les formes d'une simple visite: ils n'exhibèrent pas (ce qui est contre l'ordre reçu) la Copie de leurs pleinpouvoirs. A peine retirés, je leur rendis la visite.

Je trouvai le Duc de Vicence seul.

Il se dépouilla d'abord de son caractère diplomatique et me demanda si je n'étois pas étonné de le voir ici. Je lui répondis par l'assurance que je regardais sa nomination comme des plus heureux acquis. Assurement, me répondit le Duc, si vous partez du point de vue des intentions. Je vous par le aujourd'hui en ancien ami et à l'homme qui connait aussi bien les individus et les questions que moi. Nous causerons demain comme Plénipotentiaires.

Eh bien que pensez-vous de la paix?

Moi: Elle dépend d'un seul homme et comme vous le quittez vous devez en savoir plus que moi sur cette question.

Le Duc: Ne me croyez pas plus savant que vous ne l'êtes vous même. Tout dépend du moment où l'Empereur aura à prononcer son dernier mot; tout dépend d'une question préalable: êtes - vous décidé à ne pas accepter une neutralité pour laquelle on vous offrira des avantages et à nous faire la guerre ou non?

Moi: Je suis étonné de vous entendre mettre en doute cette dernière alternative; il me parait que tout devrait prouver la détermination de l'Empereur, de jouer le seul rôle digne d'une grande puissance.

Le Duc: Alors aurons-nous peut-être la paix! Je ne doute pas de votre détermination; mais n'en laissez également pas de doute à Napoléon.

Il est convaincu malgré toutes les apparences que vous ne demandez pas mieux que de sortir d'un dilemme par de fortes demonstrations. Il croit que vous voulez la paix ou à son défaut une neutralité bien payée.

Moi: Eh bien, écrivez à N. que s'il a envie de se perdre, il n'a qu'à suivre ses idées en opposition avec l'évidence; que nous ferons la guerre, que nous nous sommes déclarés en ce sens vis à vis de vous; que rien ne peut empêcher la déclaration de guerre le 11. que la signature de la paix le 10. En un mot, mettez à couvert votre propre responsabilité.

Le Duc: Je n'y manquerai pas. Dans tous les cas ne vous attendez à une négociation avant le retour de l'Empereur qui n'aura lieu que le 5. Je suis ici sans instructions autres que d'amuser le tapis. On va vous arriver avec toutes les questions de chicane. On ne veut pas de votre forme, pas de vos pleinpouvoirs; je n'ai pas besoin de vous dire que je suis au désespoir de voir les choses placées ainsi; aussi n'ai-je pas voulu aller à Prague et la seule idée que j'y ferai moins de mal qu'un autre m'y a determiné. Après tout

cela, que fera l'Empereur le jour où il aura la certitude que toutes ses positions sur l'Elbe sont tournées, que vous et les alliés sont plus forts que lui; que fera-t-il après avoir conféré avec ses ministres? Je l'ignore aussi bien que vous. Demandez tout ce qui est juste et surtout ce qui présente l'idée d'une véritable base de pacification, vous l'obtiendrez plus facilement que peu, parceque Napoléon en dira — l'Autriche est décidée à la guerre plutôt qu'à une trève; si vous lui demandez peu, si vous demandez tout pour vous, il ne fera aucun sacrifice pour la paix et il croira s'arranger avec vous aux dépens des puissances belligérantes.

Je répondis au Duc qu'il serait servi à souhait et que sa conviction personnelle coincidoit trop avec la nôtre, pour que nous n'allassions pas du plus parfait et du plus commun accord.

Je pris congé du Duc qui me dit encore avant mon départ: Vous ne voyez pas en moi le représentant des lubies de l'Empereur mais de son intérêt véritable et de celui de la France. Je suis tout aussi Européen dans les questions présentes que Vous pouvez l'être. Ramenez-nous en France par la paix on par la guerre, et vous serez béni par 30 Millions de Français et par tous les serviteurs et amis éclairés de l'Empereur.

Le Duc me prévint encore qu'il aurait soin de faire valoir par l'organe de Narbonne, moins suspect que le sien, la course que dans ce moment fait S. M. I. en Bohème dans le sens convenu. Les deux plénipotentiaires ayant dîné chez moi j'eus lieu de me convaincre que Mr. de Caulaincourt n'avait point perdu de tems pour représenter à Mr. de Narbonne comme une mesure prononcée le voyage de S. M. cet ambassadeur m'ayant interpellé sur ce fait avec un air tout éffaré.

57.

Comte Metternich au Comte Stadion.

Monsieur le Comte!

Prague, le 30. Juillet 1813.

Monsieur de Wacquant qui aura l'honneur de remettre la présente Expédition à Votre Excellence, se rend au quartier-général allié pour y demeurer en qualité de Commissaire militaire. Il est muni par le Prince de Schwarzenberg d'une lettre de créance pour le Général en chef des armées Russes et de Prussiennes; j'ai cru devoir lui donner des lettres de recommandation pour Messieurs de Nesselrode et de Hardenberg. Il aura l'honneur de communiquer à Votre Excellence ses instructions; ses ordres portent de suivre en tout point les directions qu'Elle voudra bien lui donner.

Il avait été question à Opotschna de l'envoi de Mr. de Tolstoy à notre quartier général. Je prie Votre Excellence, de vouloir bien nous informer de la suite qui peut avoir été donnée à ce choix par Sa Majesté l'Empereur Alexandre.

La marche de nos affaires ici semble ne plus laisser de doute, que le 10. Août sera le dernier terme de nos rapports actuels avec la France. Monsieur de Caulincourt qui est animé du meilleur esprit, ne se cache pas

plus que nous, cette probabilité; il m'a confirmé ce que depuis mon voyage à Dresde j'ai entrevu, que l'Empereur Napoléon est dans l'illusion la plus complète sur la véritable position des choses. Dérouté depuis longtems dans tous ses calculs, s'accrochant toujours de préférence à l'idée qui flatte ses vues, il paraît aussi complètement convaincu à l'heure qu'il est, que l'Autriche ne prendra jamais fait et cause contre lui, qu'il nourrissait la conviction à Moscou, que l'Empereur Alexandre se prêterait à la paix. Cet aveuglement inexplicable sons une infinité de rapports, fait qu'il est impossible de fixer d'avance quelle sera sa détermination dans le moment même où la certitude de la guerre avec l'Autriche se trouvera démontrée à ses yeux. Monsieur de Caulaincourt m'assure ne pas avoir d'instructions autres que celles de prendre ad referendum les propositions qui seraient faites ici. Les Plénipotentiaires françaises insistent sur la négociation dans les formes de Riswick, c'est à dire, en séances, reglées et formelles; ils ont l'ordre de n'exhiber leurs pleinpouvoirs que dans la première séance; ils chicanerout en un mot jusqu'au moment où l'Empereur sera de retour de sa course à Mayence, ce qui ne sera que le 5.

Il est difficile sans doute de se faire une idée de la manière dont il serait même physiquement possible d'arriver à une conclusion en 5 jours de tems. Le fait cependant n'est pas impossible, vû le caractère particulier de l'homme duquel dépend en dernier ressort la paix. Monsieur de Caulaincourt a expedié hier au soir un courrier à Mayence pour annoncer à l'Empereur, qu'il croyait de son devoir de le prévenir, qu'il avait trouvé à Prague, les questions placées d'une manière infiniment plus péremptoire qu'il ne se l'était figuré lui-même; que je lui avois de prime abord renouvellé la Déclaration que rien ne saurait détourner l'Empereur de se joindre le 11. Août à la cause des alliés si le 10. la paix n'était signée; que par conséquent ce même onze Août nous déclarerions la guerre à la France, et que d'après l'engagement pris par moi à Dresde de ne commencer les hostilités que 6. jours après cette démarche préalable, le 17. Août serait le terme de la guerre entre l'Autriche et la France.

L'Empereur est allé à Mayence pour y concerter des mesures avec ses ministres Mr. de Caulaincourt assure que tout ce que ceux-ci lui diront sera de nature à provoquer en lui les réflexions les plus sérieuses. Quelle impression ces représentations, la certitude que la rupture avec l'Autriche est inévitable, produiront-elles sur Napoléon? Personne je crois ne peut se rendre juge de cette question.

Veuillez agréer, Monsieur le Comte! les assurances de ma haute considération. Metternich m. p.

58.

Comte Metternich au Comte Stadion.

A.

Prague, le 8. Août 1813.

Monsieur le Comte!

Je vous réexpédie monsieur de Lebzeltern, pour vous donner connaissance d'une démarche que le Gouvernement français vient de faire auprès de nous.

Le Duc de Vicence est venu me trouver dans la soirée du 6., pour s'acquitter, par ordre de Sa Cour, d'une communication confidentielle qu'on lui avait enjoint de tenir secrête envers Mr. de Narbonne. La communication de Mr. de Vicence était de la teneur suivante:

Que l'Empereur Napoléon désirait savoir ce que l'Autriche entendait par le mot de paix, et quelles étaient les conditions auxquelles, si la France les agréait, elle consentait, ou à se joindre à cette puissance, ou à rester neutre.

Le Duc de Vicence s'est engagé, au nom de sa cour, au secrêt le plus inviolable sur la réponse que l'Autriche ferait à son ouverture.

La démarche de l'Empereur Napoléon nous paraît dictée par les inquiétudes que lui inspire l'attitude de l'Autriche et le surcroit de forces qu'elle offre aux alliés; sa tendance est évidemment de nous séparer d'eux par un arrangement particulier; et il nous dit assez clairement qu'il consent à payer notre défection de l'alliance pour passer à l'attitude de la neutralité, et qu'il payera plus cher encore notre coopération active en sa faveur.

La réponse que j'ai faite au Duc de Vicence, d'ordre exprès de l'Empereur, ressort de l'intention que nous devons supposer avoir dicté l'ouverture de Napoléon: plus il semble avoir peur de nous, plus il faut lui parler ferme; plus il cherche à nous séparer de nos alliés, plus nous devons resserer nos liens avec eux. Votre Excellence trouvera, dans la pièce ci-jointe, l'instruction qu'il a plu à Sa Majesté de me donner.

Il convient à notre position, à la loyauté dont nous faisons profession envers nos alliés, de leur faire part de l'ouverture de la cour de France, que nous avons également communiquée confidentiellement à Messieurs d'Anstett et de Humboldt. Vous voudrez bien, Monsieur le Comte, la porter, avec notre réponse, à la connaissance des souverains alliés.

Elle ne peut que les satisfaire entièrement, puis qu'elle énonce, comme conditions de la paix, les six articles auxquels leurs Majestés consentiraient à s'arranger. Pour le cas très - improbable où Napoléon les accepterait, elle a l'avantage d'abréger les transactions, et d'en rendre possible la conclusion, pour laquelle le tems physique ne suffit plus, si nous devons nous en tenir aux formes observées jusqu'ici; pour le cas contraire, que nous regardons comme presque certain, nous nous félicitons d'avoir pû donner aux cours alliées une nouvelle preuve de notre fermeté et d'une loyauté qui doit les lier plus intimement à nous, et nous assurer leur inébranlable attachement dans tous les événemens.

Nous y gagnons de plus que Napoléon n'acquerant la connaissance de nos conditions que par une confidence sur laquelle il nous a promis d'avance le secrêt, ne pourra jamais rendre publiques nos propositions qu'il n'aurait jamais manqué de faire imprimer dans ses gazettes, si elles lui avaient été communiquées officiellement par les plénipotentiaires des cours alliées, et qu'il ne pourra également pas les faire valoir pour justifier aux yeux de la France et de ses alliés, le renouvellement de la guerre.

Recevez, Monsieur le Comte, les assurances de ma haute considération.

Metternich.

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