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24. August

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tance et l'extension qu'on veut lui attribuer. ¶ Les provinces qui forment le ro- No. 76. yaume de Naples présentent quatre grandes divisions naturelles: les Abbruzzes, Italien, la Calabre, la Pouille et enfin le territoire voisin de la Méditerranée au milieu duquel se trouve Naples. Dans la Calabre, qui comprend trois provinces, il n'y a pas, vraiment, de brigandages, mais seulement quelques vols et des agressions isolées qu'on ne pourrait jamais faire disparaître entièrement de ces lieux. La Basilicate, qui est voisine, et qui est en grande partie montagneuse, se trouve dans des conditions analogues. Dans ces trois provinces, il n'y a pas de brigandage organisé par bandes; on peut dire la même chose des Abruzzes, où l'on ne rencontre que des brigands disséminés et qui se sont réfugiés là venant des provinces de Molise et de la Terre de Labour. Le vrai brigandage se tient dans les provinces qui entourent Naples. Il a pour base la ligne des frontières pontificales, et il a ses forces principales sur la chaîne du Matèse qui sépare la Terre de Labour de Molise, et de là il se jette sur ces deux provinces et sur celles d'Avelino, de Bénévent et de Naples, en s'étendant le long de l'Appenin jusqu'à Salerne, mais il perd de plus en plus d'importance à mésure qu'il s'éloigne de la frontière romaine, sur laquelle il s'appuie et d'où il tire des renforts en armes, en hommes et en argent. ¶ Ainsi, des quinze provinces qui composaient le royaume de Naples, cinq seulement sont infestées par les brigands. Ce n'est pas à dire qu'ils occupent ces provinces ou qu'ils aient leur siége dans aucune ville ni dans aucune bourgade; mais il vivent en petites troupes dans les montagnes, et de là ils cherchent leur proie en se précipitant sur des lieux sans défense; jamais ils n'oseraient attaquer une cité, même de troisième ordre; jamais ils n'oseraient attaquer un endroit gardé par des soldats, quelque peu nombreux qu'ils fussent; là où ils arrivent, s'ils ne rencontrent pas de résistance, ils délivrent les malfaiteurs de leurs prisons, et, renforcés par eux et par les paysans habitués depuis longtemps à ces entreprises, ils volent, saccagent et ensuite s'enfuient. ¶ Le brigandage tel qu'il est pratiqué dans la province de Naples n'est ni une réaction politique ni une chose nouvelle; il est le fruit des guerres continuelles qui ont eu lieu dans ce pays, des très fréquentes commotions politiques, des rapides changements de domination et d'un gouvernement toujours mauvais. Le brigandage désola ces provinces pendant la vice-royauté espagnole et autrichienne jusqu'en 1734; il ne cessa pas pendant le règne des Bourbons, de Joseph Napoléon et de Murat. Vous n'ignorez pas, monsieur, quelle infâme célébrité ont acquis, pendant la courte période républicaine de 1799, les noms de Prorio et de Rodio dans les Abbruzzes, contre le premier desquels fut envoyé avec une armée le général Damesme; le nom de Michel Perra, surnommé Fra-Diavolo, dans la Terre de Labour; et le nom de Gaëtan Mamone dans la province de Sora. Pendant le règne de Joseph Napoléon et de Joachim Murat jusqu'en 1815, le brigandage se montra si audacieux et si terrible qu'on jugea nécessaire d'envoyer pour le disperser, dans les Calabres, le général Manhès avec des pouvoirs illimités. Vous n'ignorez pas, monsieur, combien le général en usa largement, et il n'y a pas longtemps que ses mesures et ses actes plus que sévères furent, avec cette bonne foi habituelle des partis

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No. 76. vaincus, lorsqu'ils ont une mauvaise cause à défendre, attribuées et imputées Italien, à mal au gouvernement du roi. Les Bourbons restaurés prirent un autre 1861. moyen pour détruire le brigandage dont ils s'étaient servis, et que ensuite ils se reconnaissaient impuissants à réprimer. Le général Amato vint à composition avec la bande de Vandarelli, qui infestait la Pouille, et lui accorda, non-seulement le pardon et l'oubli, mais il fut stipulé qu'elle serait transformée, avec une riche solde, en une légion armée au service du roi, à qui elle prêterait serment. Ces conventions faites la bande vint à Foggia pour se rendre; et là, cernée par les ordres du général, elle fut détruite à coups de fusil. Le brigand Villanco, pour qu'il cessât ses agressions et qu'il se retirât à Ischia, où il vit encore, obtint de Ferdinand, non-seulement sa grâce pleine et entière, mais de plus dix-huit ducats de pension par mois. Le brigandage tire donc, dans les provinces napolitaines, sa raison d'être des précédents historiques et des habitudes du pays, sans compter les excitations des révolutions politiques, auxquelles se joignent, dans le cas présent, des raisons particulières. Je n'insisterai pas sur le mauvais gouvernement des Bourbons dans les provinces méridionales, je ne serai pas plus sévère que les représentants des puissances européennes au Congrès de Paris en 1856, qui le dénonçaient au jugement de l'Europe civilisée comme barbare et sauvage, ni plus sévère que l'honorable M. Gladstone, qui, en plein Parlement britannique, l'appela la négation de Dieu; je dirai seulement que le gouvernement bourbonien avait pour principe la corruption de tout et de tous, corruption exercée si universellement et d'une manière si persistante qu'il nous apparaît comme un miracle que ces nobles populations aient pu trouver un jour en elles-mêmes la force de s'en délivrer; tout ce qui, dans les gouvernements médiocrement organisés, sert à rendre fort, à discipliner et à moraliser, ne servait dans celui-ci qu'à affaiblir et à dépraver. La police était un privilége concédé a une association de malfaiteurs pour vexer et tailler le peuple à leur guise et pour exercer l'espionnage au compte du gouvernement. Telle était la Camorra. L'armée, sauf exception, se composait d'éléments choisis avec soin, scrupuleusement élevés par les jésuites et les chapelains dans la plus abjecte et la plus servile idolatrie du roi et dans la plus aveugle superstition. Aucune idée des devoirs envers la patrie; leur seul devoir était de défendre le roi contre les citoyens, considérés essentiellement comme des ennemis et dans un état continuel de rébellion au moins par l'intention. Et si cette rébellion devenait réelle, l'armée savait que la vie et les ressources des citoyens lui appartenaient, et qu'elle aurait toute facilité pour donner l'essor à ses instincts féroces et brutaux et à toutes les cupidités qu'on cultivait dans son coeur. Du reste, aucun réglement qui maintint la discipline et qui donnât au soldat l'esprit de corps et celui de sa noble mission, de son importance et de sa dignité; il ne s'attachait point au pays, il lui suffisait d'être soumis au roi, qui pour le gagner, n'épargnait point les plus ignobles flatteries. Ils étaient 100,000 bien fournis d'armes, d'argent, possesseurs de forteresses formidables et de ressources de guerre infinies; et cependant ils ne combattirent pas, ils reculèrent toujours devant une poignée de héros qui eurent l'audace d'aller les

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affronter; des régiments, des corps d'armée entiers se laissèrent faire pri- No. 76. sonniers. On crut que des gens qui ne combattaient pas ne feraient Italien, jamais des soldats dans le vrai sens du mot et particulièrement des soldats italiens; ils eurent la faculté de retourner dans leurs foyers; ils se débandèrent; mais, accoutumés à l'oisiveté et à la dépravation des casernes, déshabitués du travail, ils reprirent avec une égale férocité, mais avec plus de lâcheté, les traditions de Mammone et de Mona; ils se firent brigands. Si, dans leurs atroces entreprises, ils portent quelquefois la bannière bourbonienne, c'est par un reste d'habitude et non par affection. Ils se sont déshonorés en ne pas la défendant, et maintenant ils la déshonorent en en faisant une emblême de l'assassinat et de la rapine. ¶ C'est ainsi que s'est formé le brigandage napolitain, c'est de tels éléments qu'il se compose; à ces hommes se joignent des malfaiteurs, des échappés de galères du monde entier, les apôtres et les soldats de la réaction européenne accourent tous au même point, parce qu'ils sentent que maintenant se joue leur dernier enjeu et que se livre leur dernière bataille. ¶ Il m'est douloureux, monsieur, de me voir forcé par la nécessité, pour rendre ce tableau complet, de faire mention d'un personnage dont, comme catholique et comme Italien, je ne voudrais jamais prononcer le nom qu'avec respect et avec révérence; mais je ne puis, je ne dois pas le taire: le brigandage napolitain est l'espoir de la réaction européenne, et la réaction européenne a placé sa citadelle dans Rome. ¶ Aujourd'hui, le roi dépossédé de Naples en est le champion évident, et Naples l'objet apparent. Le roi dépossédé habite dans Rome le Quirinal, et il y fait la fausse monnaie dont on fournit abondamment les brigands napolitains. L'obole arrachée aux fidèles des diverses parties de l'Europe, au nom de saint Pierre, sert à enrôler ces brigands dans toutes les parties de l'Europe. C'est à Rome qu'ils viennent s'inscrire publiquement, recevoir le mot d'ordre et les bénédictions avec lesquelles ces esprits ignorants et superstitieux courent plus allègrement au pillage et au meurtre. C'est de Rome qu'ils tirent des munitions et des armes en aussi grande quantité qu'ils en ont besoin. Sur les confins romains et napolitains sont les dépôts, les lieux de réunion et de refuge où ils se rassemblent et d'où ils retournent avec une nouvelle ardeur au butin. Les perquisitions et les arrestations faites ces jours derniers par les troupes françaises ne laissent plus aucun doute à ce sujet; l'attitude hostile et les paroles prononcées dans des occasions solennelles par une partie du clergé, les armes, la poudre, les proclamations découvertes dans quelques couvents, les prêtres, les moines surpris dans les rangs des brigands, dans l'exécution de leurs entreprises, attestent d'une manière irrécusable d'où et au nom de qui partent ces excitations. Et comme il

n'y a pas là d'intérêt religieux à défendre et que, quand même il y en aurait, ce ne serait point avec de telles armes, ni avec de tels champions, ni avec de tels moyens qu'on pourrait tolérer qu'ils fussent défendus, il est évident que la connivence et la complicité de la cour romaine avec le brigandage napolitain dérivent de la solidarité d'intérêts temporels, et que l'on cherche à entretenir soulevées les provinces méridionales, et à empêcher qu'il puisse s'y établir un gouvernement régulier, réparateur de si grands

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No. 76. maux anciens et nouveaux, afin que la souveraineté du pape ne soit pas privée de son dernier soutien en Italie. Nous espérons que cela pourra 1861. fournir un nouvel et puissant argument pour démontrer jusqu'à l'évidence que le pouvoir temporel est condamné non-seulement par la logique irrésistible de l'unité nationale, mais encore qu'il est devenu incompatible avec la civilisation et avec l'humanité. Et quand même on voudrait accorder que le brigandage napolitain est d'un caractère essentiellement politique, il faudrait toujours en tirer des conséquences opposées à celles que voudraient en tirer nos ennemis. D'abord, on ne peut déduire aucun argument de sa durée, on ne doit pas perdre de vue qu'il n'est pas donné à nos forces de pouvoir envelopper de tous côtés les brigands, comme cela serait nécessaire pour les détruire complètement, puisque, battus et dispersés sur le sol napolitain, ils ont un refuge commode dans l'Etat romain, dont la limite est proche et où ils se reforment; de là, avec de nouveaux secours, ils retournent à leurs dévastations habituelles. On doit ensuite considérer que la nature du sol, la plupart du temps montagneux et nullement percé de routes praticables, favorise les attaques à l'improviste et donne en même temps aux assaillants la facilité de se disperser promptement et de se cacher. On ne doit pas oublier non plus que, nonobstant les conditions exceptionnelles dans lesquelles se trouve Naples, on y a laissé en vigueur les franchises constitutionnelles, et que, par conséquent, le respect de la liberté de la presse, de l'inviolabilité du domicile et de la liberté individuelle, du droit d'association, empêche qu'on y recoure à des répressions sommaires et instantanées. Cela présente un autre argument en notre faveur, puisque ces garanties pourraient être entre les mains de nos ennemis un instrument pour nous aliéner et soulever contre le gouvernement italien les populations, si réellement les populations méridionales étaient hostiles à l'unité italienne. Quelles sont donc les provinces, .quelles sont donc les villes, quels sont donc les villages qui se sont soulevés à l'approche de ces nouveaux libérateurs? Est-ce que par hasard le gouvernement reste dans la défiance des populations et comprime leurs sentiments par la terreur? Qu'on regarde la presse napolitaine; on pourra l'accuser plutôt de tourner à la licence que de s'abstenir de traiter comme il lui plaît les affaires publiques. ¶ Le gouvernement a armé le pays dans la garde nationale, le gouvernement a fait appel au pays pour les enrôlements volontaires. Le pays a largement répondu à cet appel. Déjà plusieurs bataillons ont pu être organisés et mobilisés, et gardes nationaux, gardes mobiles, volontaires, bourgeois et paysans courent affronter les brigands et souvent exposent leur vie; et, dans ce moment, les différences d'opinions disparaissent, les diverses fractions du parti libéral se rangent autour du gouvernement, de telle sorte que les forces régulières et les milices ne comptent pas une seule défaite. ¶ Et depuis plus d'un an, au milieu de tant d'incertitudes, d'anxietés, de tant de changements dans le plein exercice d'une liberté nouvelle et très large, Naples, cette immense cité de 500,000 habitants, n'a jamais fait entendre un seul cri de désunion, et n'a pas laissé s'étendre et se réaliser aucune des mille conspirations bourboniennes qui, à de courts intervalles, y sont nées et mortes aussitôt. ¶ Je pense que, par

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l'ensemble de ces faits il sera évident pour vous, monsieur, que le brigan- No. 76. dage napolitain n'a pas de caractère politique; que la réaction européenne, Italien, établie et favorisée à Rome, le fomente et le nourrit au nom des intérêts dynastiques du droit divin, au nom du pouvoir temporel du pape, en abusant de la présence et de la tutèle des armes françaises, placées là pour garantir des intérêts plus élevés et plus spirituels; que les populations napolitaines ne sont pas hostiles à l'unité nationale ni indignes de la liberté comme on voudrait le faire croire. Victimes d'un régime corrupteur, nous ne devons pas oublier qu'elles ont donné les héros et les martyrs de 1799, et qu'elles se sont trouvées à l'heure de la nouvelle régénération toutes prêtes à prendre place auprès de leurs autres frères d'Italie. ¶ Ce que la civilisation et les sentiments d'humanité du siècle ne peuvent tolérer, c'est que ces oeuvres de joug se préparent au siége et au centre de la catholicité, nonseulement avec la connivence, mais avec les encouragements des ministres de celui qui représente sur la terre le Dieu de mansuétude et de paix. Les consciences véritablement religieuses sont indignées de l'abus qu'on fait des choses sacrées pour des fins purement temporelles; les consciences timorées sont gravement troublées en voyant croître la discordance entre les préceptes de l'Evangile et les actes de celui qui doit les interpréter et les enseigner. Rome, en s'avançant dans la voie où elle se trouve, compromet les intérêts religieux sans sauver les intérêts mondains. Toutes les âmes honnêtes en sont déjà profondément convaincues, et cette conviction universelle facilitera beaucoup au gouvernement italien la tâche qu'il ne saurait décliner, et qui est celle de rendre à l'Italie ce qui appartient à l'Italie et de restituer en même temps à l'Eglise sa liberté et sa dignité. ¶ Agréez etc. Ricasoli.

No. 77.

SCHWEIZ. Der Gesandte in Turin an den Bundespräsidenten.

Schweizerischen Soldaten in Neapel betr.

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Turin, 17 juillet 1861.

Schweiz.

17. Juli 1861.

J'ai le regret de vous annoncer que le ministre m'a fait pressentir le No. 77. retrait de la décision qui permettait aux anciens militaires suisses de séjourner à Naples, malgré les termes de la capitulation de Gaëte. Le général Cialdini et M. Ponza de San-Martino réclament, tous les deux, le retrait de cette faveur, qui, assurent-ils, mettrait nos compatriotes dans un danger certain, vu l'animosité qui règne contre eux, comme étant les agents passés et futurs du roi de Naples. ¶ Je me suis élevé fortement contre cette décision, et j'ai adressé, à ce sujet, au ministre la lettre dont ci joint copie*).

*) Eine bekannt gewordene Stelle dieses Briefes an Baron Ricasoli lautet folgendermassen:,,Permettez-moi de vous rappeler, Monsieur le président, que sans les deux arrêtés de l'ancienne Diète et de l'Assemblée fédérale qui ont frappé les capitulations et le service militaire des Suisses à l'étranger, il est permis de douter que la révolution qui a réuni les Deux-Siciles à l'Italie, eût pu s'accomplir aussi facilement. L'Italie n'a donc eu qu'à se louer, dans cette circonstance, de la Suisse, qui n'a pas craint de sacrifier à un principe libéral les intérêts de 15,000 de ses ressortissants."

Staatsarchiv, 1861.

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