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Regnier.

(Mathurin Regnier, geboren 15731 gestorben 16131 mächt unter den franzdüischen Dichtern in dieser Gattung Epoche, und verdient immer noch viel Aufmerksamkeit, wenn gleich seine Sprache und Schreibart veraltet sind. Boileau' hatte ihn, nächst den römischen Satirendichtern, als Muster vor sich, und folgete ihm oft. Der Tadel der zu großen sitts lichen Freiheit in Regnier's satirischen Schilderungen, den man jenem Dichter so oft nachgesprochen hat, trifft nur eins zelne Stellen, und am meisten vielleicht die eilste feiner Sas tiren. Ihrer find sechszehn, worunter die hier folgendè dritte die Poesie, und das schlechte Glück der Dichter zum Gegenstande hat.)

A Monfieur Motin

Motin, la Mufe eft morte, ou la faveur pour elles
Envain deffus Parnaffe Apollon on appelle;
Envain par le veiller on acquiert du fçavoir,
Si Fortune f'en mocque, et f'on ne peut avoir
Ny honneur, ny credit, non plus que fi nos peines
Eftoient fables du peuple inutiles et vaines.
Or va, romps toy la tefte, et de jour et de nuict
Pallis deflus un livre, à l'appétit d'un bruit
Qui nous honore après que nous fommes fouz ter

re:

Et de te voir paré de trois brins de lierre,
Comme f'il importoit, eftans ombres là bas,
Que noftre nom vescuft ou qu'il ne vescust pas,
Honneur hors de faifon, inutile mérite,

Qui vivants nous trahit, et qui morts ne profite!
Sans foin de l'avenir je te laiffe le bien
Qui vient à contre-poil alors qu'on ne fent rien;
Puisque vivant icy de nous on ne fait conte,
Et que noftre vertu engendre noftre honte:
Donce' par d'autres moyens à la Cour familiers,
Par vice, ou par vertu, acquérons des lauriers;
Puisque en ce monde icy on n'en fait différence,
Et que fouvent par l'un l'autre fe recompenfe:
8 2

Apre

Regnier.

Regnier. Aprenons à mentir, mais d'une autre façon
Que ne fait Calliope, ombrageant fa chanfon
Du voile d'une fable, afin que fon mystére
Ne foit ouvert à tous, ny connu du vulgaire.

Aprenons à mentir, nos propos desguifer,

A trahir nos amis, nos ennemis baifer,

Faire la cour aux grands, et dans leurs anticham

bres,

Le chapeau dans la main, nous tenir fur nos membres,

Sans ofer ny cracher, ny touffir, ny affeoir,

Et nous couchant au jour, leur donner le bon-foir.
Car puisque la Fortune aveuglément dispofe
De tout, peut eftre enfin aurons nous quelque chofe
Qui pourra deftourner l'ingrate adverfité,

Par un bien incertain à tastons débité:

Comme ces Courtifans qui f'en faifant accroire,
N'ont point d'autre vertu fi non de dire, voire.

Or laiffons doncq' la Mufe, Apollon, et fes vers;
Laiffons le luth, la lyre, et ces outils divers,
Dont Apollon nous flatte, ingrate frenéfié!
Puisque pauvre et quaymande *) on voit la poëfie;
Ou j'ay par tant de nuicts mon travail occupé.
Mais quoi? je te pardonne, et fi tu m'as trompé,
La honte en foit au fiecle, ou vivant d'âge en âge
Mon exemple rendra quelque autre efprit plus
fage.

Mais pour moy, mon amy, je fuis fort mal payé
D'avoir fuivi cet Art. Si j'eufle eftudié
Jeune laborieux fur un banc à l'efcole,
Galien, Hippocrate, ou Jafon, ou Bartole,
Une cornette au col debout dans un parquet,
Ators et à travers je vendrois mon caquet:
Ou bien taftant le poulx, le ventre et la poitrine,
J'aurois un beau tefton pour juger d'une urine;

Ét

*) mendiant.

Et me prenant au nez, loûcher dans un bassin,
Des ragoufts qu'un malade offre à fon Médecin,
En dire mon advis, former une ordonnance,
D'un réchape f'il peut, puis d'une reverence,
C'eft re-faire l'honnefte, et quand viendroit au point
Dire, en ferrant la main, Dame! il n'en falloit,
point.

Il eft vray que le Ciel, qui me regarda naistre,
S'eft de mon jugement tousjours rendu le maistre;
Et bien que, jeune enfant, mon pere me tanfaft,
Et de verges fouvent mes chanfons menassast,
Me difant de defpit, et bouffu de colére:
Badin, quitte ces vers, et que pense tu faire?
La Mufe eft inutile; et fi ton oncle a fceu
S'avancer par cet Art; tu t'y verras deceu.
Un mesme aftre tousjours n'efclaire en cefte terre:
Mars tout ardent de feu nous menafle de guerre,
Tout le monde frémit, et ces grands mouvements
Couvent en leurs fureurs de piteux chengements.
Penfe tu que le luth, et la lyre des Poëtes
S'accorde d'harmonie avecque les trompettes,
Les fiffres, les tambours, les canons, et le fer,
Concert extravagant des mufiques d'enfer.
Toute chofe a fon regne; et dans quelques années,
D'un autre oeil nous verrons les fieres deftinées.

Les plus grands de ton temps dans le fang aguer
ris,

Comme en Thrace feront brutalement nourris,
Qui rudes n'aimeront la lyre de la Mule,
Non plus qu'une vielle, ou q'une cornemufe.
Laiffe donc ce meftier; et fage prends le foin
De t'acquerir un Art qui te ferve au befoin.

Je ne fçay, mon amy, par quelle préscience,
Il eut de nos deftins fi claire connoiffance;
Mais pour moi, je fçay bien que, fans en faire cas,
Je m sprifois fon dire, et ne le croyois pas,
Bien que mon bon Démon fouvent me dift le meş-

me.

Mais quand la paffion en nous eft fi extrême,

R 3

Les

Regnier.

Regnier. Les advertiffements n'ont ny force ny lieu;
Et l'homme croit à peine aux paroles d'un Dieu.

Ainfi me tanloit-il d'une parole efmeuë.
Mais comme en fe tournant je le perdois de veuë,
Je perdis la memoire avecque fes difcourfes,
Et resveur m'efgarai tout feul par les deftours
Des antres et des bois affreux et folitaires,

Ou la Mufe, en dormant, m'enleignoit fes miftés
res,

M'apprenoit des fecrets, et m'efchauffant le fein
De gloire et de renom, relevoit mon deffein.
Inutile fcience, ingrate, et mesprifée,

Qui fert de fable au peuple, et aux grands de rifée!
Encor feroit ce peu, fi, fans eftre avancé,
L'on avoit en cet Art fon age defpenfé,

Après un vain honneur que le temps nous refufe,
Si moins qu'une putain l'on n'eftimoit la Mufe.
Euffe-tu plus de feu, plus de foin, et plus d'Art,
Que Jodelle n'eut oncq', des - Portes, ny Ronfard,
L'on te fera la moue, et pour fruit de ta peine
Ce n'eft, ce dira- t'on, qu'un Poëte à la douzaine.

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Caron n'a plus le gouft comme on l'eut autre
fois,

Apollon eft gesné par de fauvages loix,
Qui retiennent fouz l'Art fa nature offusquée,
Et de mainte figure eft la beauté masquée.
Si pour fçavoir former quatre vers empouillés,
Faire tonner de mots mal joints et mal collés,
Ami, l'on eftoit Poëte, an verroit (cas eftrange!)
Les Poëtes plus elpais que mouches en vendanges.

Or que dès ta jeuneffe Apollon t'ait apris,
Que Calliope mesme ait tracé tes efcrits,
Que le neveu d'Atlas les ait mis fur la lyre,
Qu'en l'antre Thefpéan on ait daigné les lire;
Qu'ils tiennent du fçavoir de l'antique leçon,
Et qu'ils foient imprimés de mains de Patiffon

Si quelqueun les regarde, et ne leur fert d'obfta, Regnier.

cle;

Eftime, mon amy, que c'eft un grand miracle.

L'on a beau faire bien, et femer fes efcrits
De civette, beinjoin, de mufc, et d'ambre gris.
Qu'ils foyent pleins, relevés, et graves à l'oreille,
Qu'ils faflent fourciller les doctes de merveille;
Ne penfe, pour cela, eftre eftimé moins fol,
Et fans argent contant, qu'on te prefte un licol;
Ny qu'on n'eftime plus humeur extravagante!)
Un gros asne pourveu de mille efcus de rente.

Ce malheur eft venu de quelques jeunes veaux,
Qui mettent à l'encan l'honneur dans les bordeaux;
Et ravalant Phoebus, les Mufes, et la grace,
Font un bouchon à vin du laurier de Parnaffe;
A qui le mal de tefte eft commun et fatal,
Et vont bizarrement en pofte en l'hospital:
Difant, f'on n'eft hargneux, et d'humeur difficile,
Que l'on eft mesprifé de la troupe civile;
Que pour eftre bon Poëte, il faut tenir des fous,
Et defirent en eux, ce qu'on mesprife en tous.
Et puis en leur chanfon, fottement importune,
Ils accufent les grands, le Ciel et la fortune
Qui fuftés de leurs vers, en font fi rebattus,
Qu'ils ont tiré cet art du nombre des vertus;
Tiennent à mal d'efprit leurs chanfons indifcret

tes,.

Et les mettent au rang des plus vaines fornettes.

Encore quelques grands, afin de faire voir,
De Mecéne rivaux, qu'ils aiment le fçavoir,
Nous voient de bon oeil, et tenant une gaule,
Ainfi qu'à leurs chevaux, nous en flattent l'espaule;
Avecque bon mine, et d'un langage doux,
Nous difent fouriant: et bien que faictes vous?
Avez vous point fur vous, quelque chanfon nou-
velle?

$4

Jea

*) fournis.

د.

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