Изображения страниц
PDF
EPUB

force impérative, tandis que les institutions sociales de la première époque d'innocence, de l'âge d'or, comme la communauté des biens, la liberté individuelle et la liberté de communication, sont laissées à la prudence de l'homme et ne doivent pas être notées comme droit naturel. Cette opinion avait pour effet de désigner le droit de la première période de bonheur de l'humanité, sous le nom de jus gentium primaevum, le droit après la chute de l'homme, sous le nom de jus gentium secundaevum, selon une terminologie dans le genre de celle des partisans de la doctrine d'Ulpien.

Nous reviendrons au système de Bolognetus à une autre occasion. 1

Le point suivant qui divise les auteurs, nous occupera un peu plus longtemps. Il a pour objet le caractère du droit général d'utilité du deuxième âge, que dans l'opinion dominante, on dénomme jus naturae secundaevum ou secundarium ou jus gentium.

Ce droit était-il du droit naturel, peut-être d'une sorte particulière, parce que l'utilité y jouait un certain rôle, ou bien était-il du pur droit humain, du simple droit positif? Rappelons-nous les opinions contradictoires sur ce point chez les jurisconsultes romains et dans la science ecclésiastique. Quelle était donc, sur ce point, l'idée des précurseurs de Grotius?

On était bien d'accord sur une chose, c'est que la raison humaine n'était certes pas étrangère à la naissance du droit des gens, tout basé qu'il fût sur l'utilité. Car c'était toujours la raison, l'intelligence naturelle, fût-elle celle de l'homme déchu par le péché, qui dans les circonstances modifiées, présida à la formation du droit du deuxième âge. N'était-ce-pas, par exemple, la droite raison naturelle qui enseignait, que la malice humaine devait être refrénée par les institutions du droit des gens, comme la guerre c'est-à-dire, d'après l'explication que la glose donnait de la règle d'Hermogénien concernant cette matière, la guerre juste - la captivité et l'esclavage?

L'argumentation de la plupart des écrivains allait maintenant se poursuivre de la façon suivante.

Le raisonnement dans les circonstances dites, la ratiocinatio, produisait un résultat qui était oeuvre humaine. Le droit qui naquit de cette manière, appartenait au droit qui est basé sur la volonté des hommes; il avait surgi par le consentement commun de tout le genre humain, de tous les peuples, pour le bien 1 Bolognetus, op. cit. c. 23 n°. 2 et s., p. 313.

général, ce consentement se faisant jour dans des coutumes universellement adoptées. Il s'agissait donc ici d'un droit coutumier qui se trouvait sans doute très près de la nature et s'en déduisait, sinon nécessairement, du moins facilement et sans effort, et qui était donc acceptable pour tout le monde, mais était néanmoins du droit positif. Tantôt on en concluait qu'il s'agissait ici d'un développement universel et simultané du droit, tantôt on en revenait à l'idée qu'on avait affaire ici avec des institutions qui avaient été reprises peu à peu et graduellement d'un peuple à l'autre. Les grands peuples civilisés de l'antiquité auraient servi d'exemple, tandis que là où le droit des gens des peuples étrangers était ignoré, on aurait tiré l'inconnu du connu et on aurait admis jusqu'à preuve du contraire, que le droit y était semblable à celui des nations policées. La plupart du temps on exigeait pour l'existence d'une règle du droit des gens l'observation de cette règle, non pas par tout le genre humain, mais par la plus grande partie de celui-ci.

Par suite, d'après l'idée dominante, formulée nettement surtout par Suarez, le droit des gens n'appartenait pas au droit qui, procédant de la nature des choses, est bon en lui-même; il était du domaine du droit dont les règles et les institutions ne sont bonnes, que parce qu'elles sont imposées. Ce droit ne défendait pas de faire quelque chose, parce que cela était mauvais; mais par le seul fait de le défendre, transformait le bien en mal. C'était un droit humain, positif, jus humanum, positivum. 1

On parvenait aussi au même résultat en considérant le droit naturel comme un et indivisible et en refusant de croire à certain développement qu'il aurait pris au cours des âges successifs. 2

Il y avait cependant parmi les écrivains une minorité respectable qui considérait le droit des gens non comme un droit positif, mais, soit entièrement, soit partiellement, comme un droit naturel.

Sur ce point, nous avons en premier lieu l'opinion de Connanus qui suit Cicéron, lorsqu'il démontre, que le consentement de tous,

1 Suarez, op. cit. c. 19 no. 1, 2, 5, pp. 153, 154 et s. Vasquez, op. cit. lib. I c. 54 nos, 2-6, p. 215; lib. 2 c. 89 par. 24, p. 355. — Ayala et Faber op. cit. Soto, op. cit. lib. I qu. 5 art. 3, lib. 3 qu. I art. 3, pp. 40 et 197. Molina, op. cit. Tome I, tract. 1, disp. 5, p. 14. Bolognetus op. cit. c. 20 et s., surtout c. 23 nos. 4 et s., p. 313. Voir concernant certains points dans le texte: Gentilis, De jure belli, lib. I c. 1, pp. 7 et 8; aussi Hispanicae advocationis libri duo, lib. I c. 21 (The classics of international law, éd. Brown Scott-Frost Abbott, 1921), p. 98 i. f., 99; Victoria, op. cit., no. 391, pp. 259 et s.

2 Covarruvias, op. cit.; voir concernant ce point Connanus, op. cit. lib. I c. 5, p. 20.

1

confirmé non par des institutions et des lois, mais graduellement et tacitement par les moeurs et la coutume, devait être tenu pour la loi naturelle. Vient ensuite Victoria. D'après lui, le droit des gens est ou lui-même droit naturel, ou en est dérivé, tandis que, s'il n'en procédait pas suffisamment, le consentement de la plus grande partie de toute la terre suffit pour assurer force obligatoire à telle règle donnée. Car, raisonnait Victoria, lorsque après la chute de l'homme ou l'expiration des premiers temps après le déluge, la majorité du genre humain établissait certaines règles comme celles relatives à l'inviolabilité des ambassadeurs, à la liberté des mers, à la liberté de se déplacer et de communiquer, etc. ces règles sont obligatoires pour toute l'humanité. Le consentement, comme base du droit des gens, n'était donc, chez Victoria, que subsidiaire; la nature était la base principale. 9

2

Nous mentionnerons en troisième lieu Gentilis. Le droit des gens est à ses yeux une parcelle de la lumière divine que Dieu nous a laissée après la chute du premier homme. C'est un droit, quod est naturae et naturale dicitur; Gentilis appelle la raison juris gentium auctorem et il place les définitions du droit des gens, où la coutume et le consentement sont mis à l'avant-plan, après cette autre définition, selon laquelle le droit des gens est l'oeuvre non pas des hommes mais de Dieu, et n'a pas été appris, mais est né avec l'homme et a sa source directement dans la nature. Cela ne veut pas dire, que Gentilis identifie complètement le droit naturel et le droit des gens. Plus d'une fois il oppose les deux droits l'un à l'autre, comme il le fait à l'égard du droit de neutralité qui est d'ordre naturel, contrairement au droit commercial qui appartient au droit des gens; et à l'égard de la liberté des mers qui est de droit naturel, contrairement au pouvoir des Etats situés sur la côte, lequel fait partie du droit des gens.

En quoi consiste donc chez Gentiles la différence entre les deux droits? Là où sont opposés l'un à l'autre le droit de neutralité et le droit commercial avec subordination du droit des gens au droit naturelle droit des gens est désigné comme lex quae etiam aequum contineat et jus naturale, ainsi comme le droit, qui n'est pas du pur droit naturel, mais qui, à côté d'autre chose, renferme aussi un élément de droit naturel. Cela nous conduit à la conclusion, que l'auteur entendait par droit des gens la coutume des peuples, contenant en même temps un élément de droit naturel qui satisfît les exigences de la raison, telles qu'on 1 Connanus, op. cit., c VI p. 24.

2 Victoria, op. cit. n°. 386, 390, 391, pp. 257, 259 et s.

les appréciait à une époque donnée. C'est ainsi que Gentilis expose qu'une chose, encore qu'elle soit pratiquée par plusieurs, n'est pas pour cela encore le droit, et que les coutumes universellement adoptées par les peuples, mais contraires à la raison et aux principes supérieurs du droit, ne sont pas obligatoires, telle la coutume de refuser l'extradition des criminels, celle de vendre comme esclaves les prisonniers de guerre et de fortifier à l'envi les frontières. Selon notre auteur, Baldus, qui conteste ce dernier point au nom de la coutume, néglige là, bien à tort, la raison. La doctrine de Gentilis devait faire école, comme l'a démontré le développement du droit après Grotius. 1

Venons-en maintenant aux rapports qu'ont entre eux le droit naturel proprement dit le jus naturale primaevum - et le droit positif.

Tous les auteurs sont d'accord pour proclamer, que le droit naturel, mis indéracinablement par Dieu dans le coeur de l'homme, est immuable en essence et en principe. Si Dieu lui-même pouvait le changer, est, depuis que l'ancienne scolastique souleva cette question, un point des plus controversés. Dieu dans Sa sagesse avait Il fait la loi naturelle souveraine et indépendante de la volonté, ou existait-il un rapport entre les deux, de façon que la loi naturelle fût soumise à la volonté de Dieu? Nous mentionnons ici, à simple titre de curiosité, que selon d'aucuns, Vasquez entre autres, la possibilité de changer le droit naturel n'était pas exclue, vu que Dieu a le pouvoir de changer de fond en comble toute la nature humaine. De même que, par exemple, la philosophie de Pythagore considérait comme illicite le fait de donner la mort aux animaux et que le genre humain s'est écarté plus tard de cette règle, ainsi l'homme pourrait-il finir par trouver, qu'il est permis de tuer son prochain aussi bien que les animaux 2. En ce qui concerne encore la possibilité de changer le droit naturel, on se souvient comment Saint Thomas d'Aquin faisait

1 De jure belli (éd. Holland) lib. I c. I pp. 6-10; lib. I c. 19 p. 88; lib. I c. 21 p. 97; lib. 2 c. 15 p. 195; lib. 3 c. 19 p. 316; lib. 3 c. 21 pp. 391 et s.; lib. 3 c. 23 p. 408; De legationibus lib. II c. 18, lib. 3 c. 8, éd. Hanovre 1607, pp. 131, 182. Voir aussi Reiger, op. cit. pp. 43, 44, 47 et 48.

-

Suarez, op. cit.

Lessius, op. cit. lib. 2 c. 2 dubit.

2 Vasquez, op. cit. lib. I c. 27, surtout par. 9 et s., p. 117. lib. 2 c. 14 no. 6, 7, p. 128; c. 15 pp. 133 et s. 2, p. 20; voir aussi F. W. Hinrichs, Geschichte der Rechts- und Staatsprincipien seit der Reformation bis auf die Gegenwart (1849), I, p. 5.

Intéressant à comparer J. Burckhardt, Die Kultur der Renaissance in Italien (12e éd.) I, p. 238; Plutarchi Vitae, Numa, VIII, 10, éd. Doemner loc. cit. I, p. 77.

une distinction entre les prima principia du droit naturel et les règles qui en sont déduites par voie de conséquence: entre ce que la nature ordonne et ce qui n'est pas en opposition avec elle. Ces distinctions, en frappant l'attention des écrivains des époques postérieures, donnent lieu à divers systèmes assez nuancés. Elles donnent lieu d'abord à l'opinion que nous avons déjà vu défendre par Bolognetus et d'après laquelle le droit naturel se borne à des règles impératives, basées sur l'honestas et la justitia, tandis que la sphère dans laquelle l'homme est libre, est tout à fait soustraite au droit naturel. Il n'est donc pas question ici de mutabilité du droit naturel. D'autres, comme Covarruvias, font une distinction entre un droit naturel positif et un droit naturel négatif, le premier ordonnant et défendant, le second ne donnant pas des règles impératives, mais abandonnant la matière au droit humain, soit coutume, soit législation; le premier non susceptible de changement, le second l'étant au contraire. Dans ce système, une partie du droit naturel, celle qui se présente comme non impérative, peut donc être modifiée. Covarruvias craint d'ailleurs de multiplier les atteintes aux principes primordiaux. Les règles du droit naturel sont certes susceptibles d'explication, mais cela ne permet pas de dire en général qu'elles pourraient être abolies, sinon totalement du moins partiellement, ni que leur abolition pourrait avoir lieu dans chaque cas concret qui le demande.

Cependant la science connaissait encore une troisième voie pour apporter un temparément à la rigueur de la règle fondamentale. S'inspirant évidemment d'Aristote, Saint Thomas d'Aquin avait déjà, comme on se le rappelle, professé que par exception la mutabilité de la nature humaine avait pour corollaire la mutabilité du droit naturel. On mit de l'empressement à développer encore cette théorie (Suarez, Molina). Dieu ainsi que la volonté des hommes peuvent changer la matière soumise au droit naturel, de façon qu'aussi l'obligation naturelle s'en trouve modifiée. Il peut se présenter des circonstances accessoires qui provoquent ce changement. Et l'on cite cet exemple emprunté à Saint Thomas, que si d'après le droit naturel le dépositaire doit restituer l'objet reçu en dépôt, un glaive reçu en dépôt ne doit pas toutefois être remis à la partie adverse devenue folle. Ainsi une matière qui est régie par le droit naturel, peut subir des changements par le consentement des hommes, par le droit humain; ce qui peut modifier l'obligation naturelle. Par exemple: la loi naturelle exige de ne pas retenir le bien d'un autre contre la volonté de

« ПредыдущаяПродолжить »