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Si vous regardez l'homme ainsi découronné, vous y retrouverez d'abord les instincts sanguinaires de la brute primitive. Un membre de la Chambre des communes, sir John Coventry, avait laissé échapper une parole qu'on prit pour un blâme des galanteries royales. Le duc de Monmouth, son ami, le fit assaillir en trahison, sur l'ordre du roi, par d'honnêtes gens dévoués, qui lui fendirent le nez jusqu'à l'os. Un scélérat, Blood, avait tenté d'assassiner le duc d'Osmond et poignardé le gardien de la Tour pour voler les diamants de la couronne. Charles II, jugeant que cet homme était intéressant et distingué dans son genre, lui fit grâce, lui donna un domaine en Irlande, l'admit dans sa familiarité face à face avec le duc d'Osmond, si bien que Blood devint une sorte de héros et fut reçu dans le meilleur monde. Après de si beaux exemples, on pouvait tout oser. Le duc de Buckingham, amant de la comtesse de Shreswsbury, tue le comte en duel; la comtesse, déguisée en page, tenait le cheval de Buckingham, qu'elle embrassa tout sanglant; puis ce couple de meurtriers et d'adultères revint publiquement, et comme en triomphe,

Court lacking bread, that have not received a farthing wages since the king's coming in,» (1667. Pepys.)

Mr. Povy says that to this day the king do follow the women as much as he ever did. That the Duke of York hath come out of his wife's bed and gone to others laid in bed for him; that the family (of the duke) is in horrible debt, by spending above 60 000 liv. per annum, when he hath not 40 000 liv.

It is certain that, as it now is, the seamen of England, in my conscience, would, if they could, go over and serve the King of France or Holland, rather than us. (24 juin 1667. Ibid.)

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à la maison du mort. On ne s'étonne plus d'entendre le comte de Koenigsmark traiter de peccadille » un assassinat qu'il avait commis avec guetapens. Je traduis un duel d'après Pepys, pour faire comprendre ces mœurs de soudards et de coupe-jarrets. « Sir Henri Bellasses et Tom Porter, les deux plus grands amis du monde, parlaient ensemble, « et sir Henri Bellasses parlait un peu plus haut que d'ordinaire, lui donnant quelque avis. Quelqu'un de « la compagnie qui était là dit: Comment! est-ce qu'ils se querellent qu'ils parlent si haut? - Sir Henri Bellasses, entendant cela, dit: Non, et je « veux que vous sachiez que je ne querelle jamais que je ne frappe. Prenez cela pour une de mes règles. Comment, dit Tom Porter, frapper? Je « voudrais bien voir l'homme d'Angleterre qui oserait << me donner un coup.- Là-dessus sir Henri Bellasses « lui donna un soufflet sur l'oreille, et ils allèrent « pour se battre.... Tom Porter apprit que la voiture << de sir Henri Bellasses arrivait; alors il sortit du • café où il attendait les nouvelles, arrêta la voiture, « et dit à sir Henri Bellasses de sortir. Bien, dit sir « Henri Bellasses, mais vous ne m'attaquerez pas pen«dant que je descendrai, n'est-ce pas? Non, dit « Tom Porter. Il descendit, et tous deux dégainèrent. << Ils furent blessés tous deux, et sir Henri Bellasses si fort, qu'il mourut dix jours après. Ce n'étaient pas ces boule-dogues qui pouvaient avoir pitié de leurs ennemis. La Restauration s'ouvrit par une boucherie. Les lords conduisirent le procès des républicains avec

une impudence de cruauté et une franchise de rancune extraordinaires. Un shériff se colleta sur l'échafaud avec sir Henri Vane, fouillant dans ses poches, lui arrachant un papier qu'il essayait de lire. Pendant le procès du major général Harrison, le bourreau fut placé à côté de lui, en habit sinistre, une corde à la main; on voulait lui donner tout au long l'avant-goût de la mort. Il fut détaché vivant de la potence, éventré; il vit ses entrailles jetées dans le feu; puis il fut coupé en quartiers, et son cœur encore palpitant fut arraché et montré au peuple. Les cavaliers par plaisir venaient là. Tel renchérissait; le colonel Turner, voyant qu'on coupait en quartiers le légiste John Coke, dit aux gens du shériff d'amener plus près Hugh Peters, autre condamné; l'exécuteur approcha, et, frottant ses mains rouges, demanda au malheureux si la besogne était de son goût. Les corps pourris de Cromwell, d'Ireton, de Bradshaw furent déterrés le soir, et les têtes plantées sur des perches au haut de Westminster-Hall. Les dames allaient voir ces ignominies; le bon Evelyn y applaudissait; les courtisans en faisaient des chansons. Ils étaient tombés si bas, qu'ils n'avaient plus même le dégoût physique. Les yeux et l'odorat n'aidaient plus l'humanité de leurs répugnances; les sens étaient aussi amortis que le

cœur.

V

Au sortir de ce sang, ils couraient à la débauche. Il faut lire la vie du comte de Rochester1, homme de cour et poëte, qui fut le héros du temps. Ce sont les mœurs d'un saltimbanque effréné et triste : hanter les tripots, suborner les femmes, écrire des chansons sales et des pamphlets orduriers, voilà ses plaisirs; des commérages parmi les filles d'honneur, des tracasseries avec les écrivains, des injures reçues, des coups de bâton donnés, voilà ses occupations. Pour faire le galant, avant d'épouser sa femme, il l'enlève. Pour étaler du scepticisme, il finit par refuser un duel et gagner le nom de lâche. Cinq ans durant, diton, il resta ivre. La fougue intérieure, manquant d'une issue noble, le roulait dans des aventures d'arlequin. Une fois, avec le duc de Buckingham, il loua sur la route de Newmarket une auberge, se fit aubergiste, régalant les maris et débauchant les femmes. Il s'introduit déguisé en vieille chez un bonhomme avare, lui prend sa femme, qu'il passe à Buckingham. Le mari se pend; ils trouvent l'affaire plaisante. Une autre fois il s'habille en porteur de chaise, puis en mendiant, et court les amourettes de la canaille. Il finit par se faire charlatan, astrologue, et vend dans

1. Voir une Étude détaillée sur Rochester, par M. Forgues. (Revue des Deux-Mondes, août et septembre 1857.)

les faubourgs des drogues pour faire avorter. C'est le dévergondage d'une imagination véhémente, qui se salit comme une autre se pare, qui se pousse en avant dans l'ordure et dans la folie comme une autre dans la raison et dans la beauté. Qu'est-ce que l'amour pouvait devenir dans des mains pareilles? On ne peut pas copier même les titres de ses poëmes: il n'a écrit que pour les mauvais lieux. Stendahl disait que l'amour ressemble à une branche sèche jetée au fond d'une mine; les cristaux la couvrent, se ramifient en dentelures, et finissent par transformer le bois vulgaire en une aigrette étincelante de diamants purs. Rochester commence par lui arracher toute sa parure; pour être plus sûr de le saisir, il le réduit à un bâton. Tous les fins sentiments, tous les rêves, cet enchantement, cette sereine et sublime lumière qui transfigure en un instant notre misérable monde, cette illusion qui, rassemblant toutes les forces de notre être, nous montre la perfection dans une créature bornée, et le bonheur éternel dans une émotion qui va finir, tout disparaît; il ne reste chez lui qu'un appétit rassasié et des sens éteints; le pis, c'est qu'il écrit sans verve et correctement; l'ardeur animale, la sensualité pittoresque lui manquent; on retrouve dans ses satires un élève de Boileau. Rien de plus choquant que l'obscénité froide. On supporte les priapées de Jules Romain et la volupté vénitienne, parce que le génie y relève l'instinct physique, et que, la beauté de ses draperies éclatantes, transforme l'orgie en une œuvre d'art. On pardonne à Rabelais quand on a senti la séve profonde

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